Le 7 avril 2015, l’ASN a rendu publique une anomalie de la composition de l’acier dans certaines zones du couvercle et du fond de la cuve du réacteur de l’EPR de Flamanville. La cuve était déjà installée !
La chronologie avant cette date est basée sur une reconstitution. L’ASN a rendu publique sa propre reconstitution. Voir, en particulier, la note préparée pour le groupe de travail du HCTISN (lien direct, copie).
EDF et Areva ont aussi fait leur propre reconstitution des évènements relatifs à la cuve de l’EPR, mais on tardé avant de les mettre en ligne.
Le 13 mars 2017, l’ASN a mis en ligne une note chronologique relative aux générateurs de vapeur (lien direct, copie).
Juillet 2003 : Michel-Yves Bolloré devient le principal actionnaire de Creusot-Forge
Source : Reporterre
13 juillet 2005 : loi de programme fixant les orientations de la politique énergétique
L’article 5 stipule : “La politique de recherche doit permettre à la France d’ici à 2015, d’une part, de conserver sa position de premier plan dans le domaine de l’énergie nucléaire et du pétrole et, d’autre part, d’en acquérir une dans de nouveaux domaines en poursuivant les objectifs suivants : […]
– le soutien à l’industrie nucléaire nationale pour la mise au point et le perfectionnement du réacteur de troisième génération EPR et au développement des combustibles nucléaires innovants ;”
L’annexe précise que “la France devra être, vers 2015, en mesure de décider si elle lance une nouvelle génération de centrales nucléaires en remplacement de l’actuelle.
A cette fin, les technologies nécessaires doivent être disponibles au moment du renouvellement du parc. […] La construction très prochaine d’un réacteur de troisième génération EPR est donc indispensable pour optimiser techniquement et financièrement le déploiement ultérieur des nouvelles centrales et compte tenu des progrès technologiques importants de ce modèle de réacteur en matière de sûreté. En outre, à l’horizon de sa mise en service, sa production sera nécessaire à l’équilibre du réseau électrique français.”
Lien direct vers la version initiale de la loi.
Septembre 2005 : Areva informe EdF du choix des fournisseurs retenus pour les pièces forgées de la cuve de l’EPR de Flamanville.
EdF précise que les premiers échanges avec Areva relatifs aux qualifications techniques ont débuté à la mi-2005.
Source : note EdF datée du 27 juin 2016 pour le HCTISN. Cette note devrait enfin être publiée par le HCTISN malgré l’opposition initiale d’EdF.
12 décembre 2005 : nouvel arrêté relatif aux équipements sous pression nucléaires (arrêté ESPN)
“La nouvelle réglementation de 2005 relative aux équipements sous pression nucléaires prévoit de qualifier les procédés de fabrication, non seulement en faisant des essais sur les zones les plus sensibles (zones les plus sollicitées mécaniquement ou zones de soudure), mais également en réalisant des essais sur les zones courantes des pièces sous pression” (source ASN : lien direct)
lien direct vers l’arrêté dans sa version initiale
16 décembre 2005 : L’ASN alerte EDF sur les nombreux écarts constatés chez Creusot Forge
Dans un courrier rendu public par France Inter le 31 mars 2017, l’ASN alerte EDF sur les “nombreux écarts [constatés] concernant le forgeron Creusot Forge” et lui rappelle que, “comme exploitant, il [lui] appartient d’exercer ou de faire exercer sur ce prestataire une surveillance permettant de s’assurer de l’application par celui-ci des dispositions” notifiées dans l’arrêté du 10 août 1984 (lien direct vers le courrier sur le site de l’ASN).
Dans un autre courrier daté du 16 mai 2006, l’ASN rappelle EDF à l’ordre à ce sujet en expliquant qu’ “en 2005, les fabrications des équipements sous pression nucléaires du forgeron Creusot Forge ont été émaillées de nombreux incidents : nombre de rebuts important, écarts constatés par le BCCN au cours des inspections de fabrication et par les constructeurs dans le cadre de leurs actions de surveillance,…”. Et d’ajouter qu’il lui appartient “d’exercer ou de faire exercer sur les prestations de Creusot Forge une surveillance permettant de s’assurer de l’application des dispositions notifiées. Ces incidents récurrents et l’absence de réaction de [la part d’EDF] ont conduit le BCCN à organiser une inspection chez [son] fournisseur Creusot Forge”. Le courrier dresse toute une série de constats suite à cette inspection (lien direct vers le courrier sur le site de l’ASN).
Le BCCN est, jusqu’en 2006, le Bureau de Contrôle des Chaudières Nucléaires de l’ASN.
L’ASN doit même rappeler à EDF les règles élémentaires de la sûreté : “l’article 2 de l’arrêté du 10 août 1984 stipule que “l’exploitant identifie les activités que lui-même ou ses prestataires exercent et qui influent sur la qualité des éléments importants pour la sûreté”. Les opérations de fabrication font partie du champ d’application de cet arrêté.”
Lien direct vers ces courriers mis en ligne par France Inter et copie.
Mars 2006 : EdF rappelle à Areva ses engagements concernant les approvisionnements pour Flamanville 3
Concernant la cuve de l’EPR, ces engagements sont le respect des exigences de l’arrêté ESPN et la réalisation des contrôles nécessaires a posteriori.
Source : note EdF datée du 27 juin 2016 pour le HCTISN. Cette note devrait enfin être publiée par le HCTISN malgré l’opposition initiale d’EdF.
11 mai 2006 : décision d’engagement du projet Flamanville 3
21 août 2006 : courrier de l’ASN relatif à la qualification technique des approvisionnements anticipés constitutifs de la cuve EPR destinée à Flamanville
Dans ce courrier, l’ASN demande explicitement à Areva de lui “indiquer la façon de s’assurer de l’absence de singularité dans la zone centrale de la calotte et de l’homogénéité des caractéristiques mécaniques entre le centre et la rondelle d’essais.” (Demande n°10) (lien direct, copie). C’est là que sera découverte l’anomalie…
Selon l’ASN, “cette question n’a pas reçu de réponse sur le fond, AREVA renvoyant alors à un futur dossier” (source : lien direct, copie). La réponse d’Areva n’est pas publique.
Septembre 2006 : Areva acquiert Creusot Forge
5 septembre 2006 : Creusot Forge coule la calotte du couvercle de la cuve de l’EPR de Flamanville 3
La fabrication sera terminée le 10 octobre 2006. Source ASN : lien direct, copie.
23 janvier 2007 : Creusot Forge coule la calotte du fond de la cuve de l’EPR de Flamanville 3
La fabrication sera terminée le 14 décembre 2007. Source ASN : lien direct, copie.
Afin de vérifier l’orientation des lingots d’acier, Areva a prélevé et analysé en 2007 plusieurs copeaux de matière sur les deux faces de chacun des flans forgés. Les deux prélèvements effectués sur la calotte supérieure ont donné des valeurs de concentration de carbone élevées (0,265 % et 0,277 %) qui auraient pu amener à s’interroger sur la présence de ségrégations majeures positives excessives. Ces valeurs apparaissent en 2007 dans le dossier de synthèse de qualification de janvier 2010 qui indique que les résultats sont conformes ainsi que dans les dossiers de qualification technique d’avril 2010 transmis à l’ASN.
Source : rapport à paraître du HCTISN.
3 avril 2007 : courrier de l’ASN relatif à l’évaluation de la conformité des ESPN et documentation technique
Dans ce courrier, l’ASN prévient explicitement Areva que “pour le cas de la cuve, la situation est également préoccupante puisque le contenu de la documentation technique est au même niveau que celui des générateurs de vapeur alors que la majorité des composants de la cuve est déjà sur le site de Chalon pour les opérations de revêtement par soudage et d’assemblage.” (lien direct, copie)
La réponse d’Areva n’est pas publique.
11 avril 2007 : Décret n° 2007-534 autorisant la création de l’installation nucléaire de base dénommée Flamanville 3, comportant un réacteur nucléaire de type EPR, sur le site de Flamanville (Manche)
16 juillet 2007 : courrier de l’ASN à AREVA alertant sur le risque industriel consistant à fabriquer des composants avant leur qualification technique.
Areva a changé le procédé de fabrication des calottes qui sont désormais forgées en une seule pièce afin d’éviter les soudures. Mais ce procédé aurait dû être qualifié au préalable sur des pièces test. Comme Creusot Forge a sauté cette étape, l’ASN prévient Areva du risque industriel : “La qualification technique des opérations de fabrication est donc un élément essentiel de la garantie de qualité des équipements […]. Elle prévoit la réalisation d’un dossier de qualification technique puis la validation de ce dossier à partir de contrôles et d’essais sur une pièce “de qualification”. Cette séquence doit en principe être achevée avant la fabrication des pièces “de série”, pour lesquelles les contrôles de fabrication et essais de recette sont réduits par rapport aux essais de qualification. L’ASN a déjà eu l’occasion d’attirer votre attention sur l’importance et les modalités de cette démarche.” Les courriers en référence ne sont pas en ligne sur le site de l’ASN.
Et l’ASN d’insister : “Le fait de réaliser les pièces “de série” avant d’avoir finalisé la qualification technique pose deux difficultés portant, respectivement, sur la garantie de qualité des pièces et sur les contrôles de l’ASN […]. Si une période transitoire devait être tolérée du fait que le choix d’appliquer l’arrêté [de 2005] est intervenu tardivement par rapport à la construction du réacteur de Flamanville 3, il n'[est] pas souhaitable que le fait de réaliser le dossier de qualification a posteriori se poursuive au-delà de l’année 2007 […]. J’attire votre attention sur le fait que ces pratiques constituent une prise de risque industriel importante.” (lien direct, copie).
Ainsi, à partir du 1er janvier 2008, toute nouvelle fabrication de composant est conditionnée à l’émission d’un dossier de qualification technique jugé recevable. L’ASN note cependant que “ces points d’arrêt ne concernaient pas la fabrication des équipements dont les composants avaient déjà été élaborés, comme les calottes de la cuve, et qui de fait se poursuivait” mais leur introduction “a incontestablement permis de faire progresser la qualité des dossiers de qualification technique.”
La réponse d’Areva n’est pas publique.
12 décembre 2007 : courrier de l’ASN à AREVA refusant le dossier de synthèse de la qualification de la calotte supérieure
Dans ce courrier de refus, l’ASN précise que “le document ne contient aucune démonstration de l’homogénéité de ces résultats dans la calotte.” (lien direct, copie).
Le document ASN fait état de plusieurs lettres d’Areva qui ne sont pas publiques.
Septembre 2008 : mise en place d’un groupe de travail tripartite ASN/AREVA/EDF afin de traiter des modalités techniques de l’application de l’arrêté ESPN
Auparavant, les discussions sur ce sujet, qui ont eu lieu entre l’ASN et le fabricant, n’ont pas impliqué EDF.
Source : note EdF datée du 27 juin 2016 pour le HCTISN. Cette note devrait enfin être publiée par le HCTISN malgré l’opposition initiale d’EdF.
Décembre 2008 : forgeage de la virole basse d’un des générateurs de vapeur de Fessenheim 2
Selon une note technique de l’ASN (lien direct, copie) datant de 2016, cette virole basse a été fabriquée par Areva NP dans son établissement de Creusot Forge par forgeage à partir d’un lingot d’acier d’environ 95 tonnes. Le lingot issu de l’aciérie est un lingot creux qui est ensuite forgé avec une presse afin de rendre la pièce cylindrique et de l’étirer pour lui donner ses propriétés et ses dimensions finales. Au cours de ce forgeage, les extrémités de la pièce doivent être coupées et chutées. En effet, du fait du processus de solidification du lingot, celles-ci présentent des caractéristiques métallurgiques, chimiques et mécaniques dégradées.
Au cours du forgeage de la virole basse d’un des générateurs de vapeur du réacteur 2 de la centrale nucléaire de Fessenheim, Creusot Forge a décidé de ne pas chuter une des deux extrémités du lingot, appelée « masselotte ». La majeure partie de celle-ci est donc présente dans la pièce finale, ce qui peut conduire à la présence d’inclusions dans l’acier et à une composition chimique locale du matériau pouvant dégrader sa soudabilité, son vieillissement et ses propriétés mécaniques.
Le certificat d’épreuve de ce générateur de vapeur, délivré le 1er février 2012, est suspendu le 18 juillet 2016. Voir aussi l’extrait du document Areva et les photos explicatives dans la présentation faite le 25 octobre 2016 devant l’OPECST (lien direct, copie).
20 au 24 juillet 2009 : inspection de Creusot Forge par la NRC américaine
Les échanges de courriers sont en ligne ici.
29 mars 2011 : courrier de l’ASN à AREVA demandant d’analyser la possibilité de s’appuyer sur des essais réalisés ou à réaliser sur d’autres composants
L’ASN explique que l’analyse devait être complétée et demande d’étudier la possibilité de s’appuyer, si nécessaire, sur des essais réalisés ou à réaliser sur d’autres composants représentatifs : “à ce titre, vous pourrez notamment analyser la possibilité de vous appuyer, le cas échéant, sur des essais réalisés, ou à réaliser, sur d’autres composants.” (lien direct, copie)
31 juillet 2012 : Areva propose de faire des essais sur une autre pièce
Selon l’ASN, “AREVA a proposé de réaliser des essais sur une pièce élaborée dans les mêmes conditions que celles des calottes de Flamanville 3 pour vérifier l’effet de ces paramètres.” Il s’agit de la calotte supérieure approvisionnée pour un projet d’EPR aux Etats-Unis (calotte UA) qui a été abandonné. Le centre de la pièce doit être percé, de toutes façons. Source ASN : lien direct, copie.
Les courriers Areva ne sont pas publics.
3 septembre 2012 : courrier d’AREVA précisant notamment la définition de la qualité attendue au centre des calottes
Selon l’ASN, après des échanges techniques pour s’assurer de la représentativité de la pièce sur laquelle ces essais seraient conduits et obtenir du fabricant la définition de la qualité attendue dans les zones à caractériser, AREVA a soumis un dossier par lequel elle justifie que la calotte UA est représentative de l’effet des ségrégations positives ou négatives de carbone et propose de réaliser des essais mécaniques et des analyses chimiques dans une carotte de diamètre 80 mm prélevée dans la partie centrale de la calotte supérieure UA. Mais, toujours selon l’ASN, Areva considère que la présence éventuelle de ségrégation résiduelle de carbone n’aurait pas d’impact sur les valeurs des essais mécaniques et ne modifie pas la qualité attendue initiale.
Source ASN : lien direct, copie. Ce courrier n’est pas public.
15 octobre 2012 : courrier de l’ASN à AREVA donnant accord sur la réalisation d’essais dans la calotte supérieure UA
L’ASN n’a pas émis d’objection aux opérations de carottage de la calotte supérieure UA et au programme des essais mécaniques associés (lien, copie).
12 novembre 2012 : carottage de la calotte supérieure UA par Areva
Selon EdF, une fiche de non conformité interne a été ouverte sur le faible diamètre de la carotte. Les essais n’auront lieu que durant l’été 2014 par Areva, c’est à dire après la mise en place de la cuve dans l’EPR de Flamanville.
Source : note EdF datée du 27 juin 2016 pour le HCTISN. Cette note devrait enfin être publiée par le HCTISN malgré l’opposition initiale d’EdF.
2013 : Mise en évidence de mauvais résultats lors de tests réalisés par le service R&D d’AREVA
Des tests réalisés en R&D par Areva à Lyon en 2013 sur l’acier d’un fond de générateur de vapeur (du même type que celui des calottes de la cuve du réacteur EPR de Flamanville) avaient donné des résultats médiocres et auraient dû alerter AREVA. EdF dit n’avoir découvert ce rapport qu’en 2016.
Source : réunion du 6 décembre 2016 du HCTISN (lien direct vers les présentations et le verbatim)
26 novembre 2013 : courrier de l’ASN à AREVA autorisant une première séquence de montage d’équipements primaires dans l’EPR de Flamanville
En réponse à “une première séquence de montage d’équipements du circuit primaire du réacteur qui consiste à introduire dans le bâtiment réacteur puis souder entre eux le corps de cuve et [des équipements de la boucle 2]”, l’ASN “autorise à procéder à l’introduction du corps de cuve dans le puits de cuve”. (lien direct, copie).
24 janvier 2014 : mise en place de la cuve de l’EPR de Flamanville
Source ASN : lien direct, copie.
Été 2014 : essais sur la carotte prélevée dans la calotte supérieure UA
Octobre 2014 : Areva informe EdF et l’ASN des résultats des essais réalisés sur la carotte prélevée dans la calotte supérieure UA
Ces résultats mettent en évidence les non-conformités des calottes suite à une anomalie de la composition de l’acier. Le public ne sera informé que le 7 avril 2015.
27 novembre 2014 : fin du soudage des tuyauteries du circuit primaire principal sur la cuve
Source ASN : lien direct, copie.
7 avril 2015 : l’ASN annonce une anomalie de la composition de l’acier dans certaines zones du couvercle et du fond de la cuve du réacteur de l’EPR de Flamanville
L’ASN annonce (lien direct) que les résultats des essais menés sur la calotte UA ont mis en évidence, fin 2014, “la présence d’une zone présentant une concentration importante en carbone […] conduisant à des valeurs de résilience mécanique plus faibles qu’attendues. Des premières mesures ont confirmé la présence de cette anomalie dans le couvercle et le fond de la cuve de l’EPR de Flamanville. AREVA a proposé à l’ASN de réaliser à partir d’avril 2015 une nouvelle campagne d’essais approfondie sur un couvercle représentatif pour connaître précisément la localisation de la zone concernée ainsi que ses propriétés mécaniques.” De plus, “l’ASN a informé ses homologues étrangères concernées par la construction d’un réacteur EPR.” En effet, “certaines calottes des cuves des réacteurs de Taishan 1 et 2 (Chine) ont été fabriquées par Creusot Forge selon un procédé similaire à celui de la cuve de l’EPR de Flamanville. Ce n’est pas le cas des calottes de la cuve de l’EPR d’Olkiluoto, qui proviennent d’un autre fournisseur.”
Des précisions techniques accompagnent ce communiqué (lien direct).
Dans son avis, l’IRSN rappelle “qu’une évolution notable de technologie de fabrication a été adoptée sans la qualification préalable requise. […] De plus, les résultats d’analyses chimiques effectuées au cours de la fabrication, qui avaient montré d’importantes ségrégations majeures positives au centre de la calotte de couvercle du réacteur de Flamanville, n’avaient pas conduit alors à s’interroger sur l’origine et les conséquences de cette ségrégation.” Et d’ajouter qu’Areva propose la réalisation d’essais complémentaires sur la calotte supérieure, initialement destinée au réacteur EPR Hinkley Point C.
Source : avis IRSN N°2015-00118 du 3 avril 2015 rendu public le 24 juin 2016 (lien direct, copie).
Dans un communiqué de presse (lien direct), Areva signale avoir “informé l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) de la réalisation à partir d’avril 2015 d’une nouvelle campagne d’essais pour la qualification du couvercle et du fond de la cuve de l’EPR de Flamanville. Cette campagne fait suite à des essais chimiques et mécaniques réalisés sur une pièce représentative du couvercle et du fond de la cuve.” Le mot “anomalie” n’est pas utilisé. La seule information du fabricant est que “les résultats transmis à l’ASN par AREVA à l’issue des premiers essais ont montré que l’un des paramètres n’était pas respecté dans une zone présentant une concentration en carbone plus importante que la moyenne.”
21 avril 2015 : Areva annonce un audit externe
Areva annonce dans un communiqué de presse (lien direct) une revue externe confiée à un expert indépendant, la société franco-anglaise Lloyd’s Register Apave Limited. Elle débutera le 4 mai 2015 pour une durée minimale de deux mois et a pour but “d’identifier les causes d’éventuels défauts dans les pratiques et le contrôle qualité, ainsi que les mesures à prendre pour poursuivre les améliorations apportées depuis l’acquisition de la forge en 2006.” Ses conclusions ont été transmises à l’ASN en octobre 2015.
Cette revue, qui ne remonte que jusqu’en 2010, a été jugée peu approfondie et insuffisante par l’ASN car ne permettant pas d’obtenir une vision d’ensemble de l’organisation et des pratiques de Creusot Forge, de la qualité des pièces produites et de la culture de sûreté de l’établissement. L’ASN a demandé fin 2015 à AREVA de la compléter en remontant au moins jusqu’en 2004, date des premières fabrications destinées à l’EPR. (source ASN : lien direct).
Rapport obtenu par Greenpeace et Sortir du Nucléaire après saisie de la CADA (lien direct, copie). La version fournie par Areva était en partie noircie (lien direct).
Septembre 2015 : Areva et EDF informent l’ASN d’un risque de ségrégation carbone sur 26 fonds de générateurs de vapeur (GV) fabriqués pour AREVA par le forgeron japonais JCFC et présents sur 12 réacteurs du parc.
Source : présentation EDF (lien direct)
30 septembre 2015 : réunion du Groupe permanent d’experts pour les équipements sous pression nucléaires (GP ESPN) sur l’anomalie affectant la composition de l’acier dans certaines zones du couvercle et du fond de la cuve du réacteur de l’EPR de Flamanville.
A noter que des représentants du HCTISN, de l’ANCCLI et des autorités de sûreté étrangères concernées par la construction d’un EPR ont assisté à cette séance en tant qu’observateurs.
Lien direct vers le communiqué relatif à cette réunion et lien direct vers les documents en français et en anglais.
5 octobre 2015 : la ministre chargée de la sûreté nucléaire et de l’énergie saisit le Haut Comité pour la Transparence et l’Information sur la Sécurité Nucléaire (HCTISN)
La ministre saisit le Haut Comité pour qu’il veille “à la transparence du processus et s’assure de la bonne transmission des informations vers la société civile.” L’ACRO siège dans le groupe de travail mis en place sur ce sujet.
Il est intéressant de noter que la ministre demande au Haut comité “quelles sont les mesures prises par AREVA et EDF pour assurer l’information du public et la transparence de ce programme d’essais sur la cuve témoin, en particulier sur les tests qui seront réalisés et les résultats obtenus, ainsi que sur l’analyse de la conformité de la cuve de l’EPR de Flamanville 3 au regard de la règlementation relative aux équipements sous pression nucléaires ?”
Lien direct vers la lettre de saisine.
12 décembre 2015 : l’ASN ne formule pas d’objection au lancement du nouveau programme d’essais concernant les propriétés mécaniques du couvercle et du fond de la cuve de l’EPR de Flamanville 3 proposée par Areva.
Dans son courrier à Areva, “l’ASN considère que l’exigence de qualification technique n’est pas respectée et qu’AREVA n’a pas fait le choix de la meilleure technique disponible pour la réalisation des calottes de la cuve de l’EPR de Flamanville 3. Ces constatations affectent le premier niveau de défense en profondeur, qui vise à assurer la garantie d’un haut niveau de qualité de conception et de fabrication de la cuve destinée à l’EPR de Flamanville 3.”
L’ASN considère acceptable la démarche proposée par Areva et ne formule pas d’objection au lancement du nouveau programme d’essais prévu sur deux calottes sacrificielles (calotte supérieure UK et de la calotte inférieure UA). Ce programme n’est pas public.
Cependant, l’ASN n’a pas d’objection à la poursuite des opérations de fabrication sur le couvercle de la cuve de l’EPR de Flamanville 3, mais rappelle toutefois qu’on ne peut pas exclure que l’instruction conduise à ne pas accepter le couvercle et le fond de cuve. Et d’ajouter qu’elle considère comme nécessaire l’étude dès à présent de l’ensemble des scénarios techniques alternatifs, tels que le remplacement du fond de cuve et la fabrication d’un nouveau couvercle.
A noter qu’Areva voulait réaliser tous ces essais en interne. Plusieurs associations, dont l’ACRO, ont fait part de leur opposition lors de réunions avec les autorités. Ainsi, dans sa lettre à Areva, “l’ASN considère que la réalisation d’une partie des essais mécaniques par un laboratoire indépendant du groupe AREVA renforcerait la robustesse des résultats du programme d’essais et la confiance dans leur impartialité.”
Liens directs vers le communiqué ASN et vers le courrier à Areva (copie).
12 février 2016 : livraison du couvercle de la cuve de l’EPR de Flamanville
Alors que le couvercle n’est pas qualifié, EDF prend le risque de livrer le couvercle et de l’instrumenter pour son utilisation. C’est Greenpeace qui en fait l’annonce. Dans un communiqué, l’ACRO a dénoncé la politique du fait accompli.
3 mai 2016 : l’ASN annonce avoir été informée par Areva d’irrégularités concernant des composants fabriqués dans son usine de Creusot Forge
Suite à la demande d’analyses complémentaires de la qualité de la fabrication dans son usine de Creusot Forge en octobre 2015, Areva a, le 25 avril 2016, informé l’ASN des premiers résultats.
Areva a découvert que certains dossiers d’assurance qualité de Creusot-Forge étaient marqués par deux barres afin de signaler qu’ils devaient rester internes. Ils seront qualifiés de “dossiers barrés”.
Selon l’ASN, “ils mettent en évidence des irrégularités dans le contrôle de fabrication d’environ 400 pièces produites depuis 1965, dont une cinquantaine seraient en service sur le parc électronucléaire français. Ces irrégularités consistent en des incohérences, des modifications ou des omissions dans les dossiers de fabrication portant sur des paramètres de fabrication ou des résultats d’essais. L’ASN a demandé à AREVA de lui transmettre au plus tôt la liste des pièces concernées et son analyse des conséquences sur la sûreté des installations en lien avec les exploitants concernés.” Cette liste sera publiée le 23 septembre 2016.
Lien direct vers la note d’information.
Une inspection est menée dans l’établissement de Creusot Forge avec
pour objectif l’examen de la pertinence et de l’efficacité des dispositions du plan d’action qualité mis en place dans cet établissement suite à la détection de plusieurs écarts lors de la fabrication de composants. Selon la lettre de suite (lien direct), “lors de l’inspection il a été noté que ce plan d’action ne contient pas d’action spécifique vis-à-vis du risque potentiel de falsification de documents ou de dissimulation de résultats défavorables. La mise en place d’une boîte de réception de messagerie électronique dédiée où il est possible de déposer des informations s’est révélée inefficace sur ce sujet.”
13 juin 2016 : EDF met à l’arrêt le réacteur 2 de la centrale nucléaire de Fessenheim affecté par une des irrégularités détectées dans l’usine Creusot Forge d’Areva
Suite aux vérifications de conformité des activités passées de Creusot Forge, Areva a mis en évidence l’existence de dossiers supplémentaires contenant des informations n’apparaissant pas dans le rapport de fin de fabrication de plusieurs composants d’équipement du parc nucléaire. Dans une note d’information (lien direct, copie), EDF explique qu’à la date du 30 mai 2016, “Areva a établi 80 constats qui nécessitent une caractérisation pour ces équipements du parc en exploitation. Pour 68 d’entre eux concernant 64 pièces, EDF a d’ores et déjà terminé ses analyses indépendantes et la caractérisation de ces constats à partir des données fournies par Areva.” La liste des réacteurs est donnée, mais pas celle des pièces. Et d’ajouter, que “pour les 12 constats restant portant sur 9 composants installés uniquement sur les sites de Blayais (unité n°1) et de Fessenheim (unité n°2), actuellement à l’arrêt, des compléments de caractérisation sont nécessaires pour conforter la démonstration.” On n’en saura pas plus.
Le 16 juin 2016, l’ASN précise, dans une note d’information (lien direct), qu’“à la date du 15 juin, EDF a indiqué à l’ASN avoir terminé la caractérisation de 79 des 80 irrégularités identifiées à ce stade comme affectant ses réacteurs en exploitation dans les dossiers de fabrication de l’usine Areva de Creusot Forge. EDF conclut que ces irrégularités n’ont pas de conséquence sur la sûreté des réacteurs concernés. L’irrégularité encore en cours de caractérisation concerne un générateur de vapeur du réacteur 2 de la centrale nucléaire de Fessenheim. Afin de réaliser des investigations complémentaires, EDF a procédé à la mise à l’arrêt de ce réacteur le 13 juin et a transmis des premiers éléments d’analyse à l’ASN le 15 juin. […].”
“Ces irrégularités, de natures très diverses, consistent en des incohérences, des modifications ou des omissions dans les dossiers de fabrication relatives à des paramètres de fabrication ou des résultats d’essais. Certaines informations relatives au forgeage, au traitement thermique, aux essais mécaniques ou aux analyses chimiques n’étaient ainsi pas transmises au client de Creusot Forge et à l’ASN. Dix-neuf de ces irrégularités portent sur le respect des spécifications du client et des règles de fabrication des équipements sous pression nucléaires.”
Le certificat d’épreuve de ce générateur de vapeur est suspendu le 18 juillet 2016.
23 juin 2016 : l’ASN informe le public que certains générateurs de vapeur de réacteurs d’EDF pourraient présenter une anomalie similaire à celle de la cuve de l’EPR de Flamanville
Les analyses menées par EDF à la demande de l’ASN depuis 2015 concluent que 46 fonds primaires de générateurs de vapeur fabriqués par Creusot Forge ou par une forge située au Japon (JCFC) pourraient présenter une zone de concentration importante en carbone pouvant conduire à des propriétés mécaniques plus faibles qu’attendues. Ces générateurs de vapeur équipent 18 réacteurs de 900 ou 1450 MWe dont la liste est donnée. L’ASN a demandé des investigations complémentaires.
Ces composants sont essentiels pour la sûreté car ils participent au confinement de l’eau du circuit primaire. Ils constituent une partie de la seconde et de la troisième barrières de confinement.
L’ASN ajoute que des analyses d’autres composants forgés de la cuve, du pressuriseur et des générateurs de vapeur, susceptibles d’être également concernés par cette anomalie, se poursuivent.
Liens directs vers le communiqué et la note d’information.
24 juin 2016 : réunion du Groupe permanent d’experts pour les équipements sous pression nucléaires.
Des représentants de l’OPECST, du HCTISN et de l’ANCCLI ont été invités à y participer en tant qu’observateurs.
Lien direct vers les documents en français et en anglais.
18 juillet 2016 : l’ASN suspend le certificat d’épreuve d’un générateur de vapeur du réacteur n°2 de Fessenheim affecté par une des irrégularités détectées dans l’usine Creusot Forge d’Areva
Selon l’ASN, “le processus de forgeage de la virole basse de ce générateur de vapeur, réalisé en 2008, n’a pas été mené conformément au dossier technique remis à l’ASN et aux règles de l’art. L’ASN n’avait pas été informée de cette non-conformité. La connaissance de cette non-conformité, sans justification particulière, aurait conduit l’ASN à ne pas délivrer de certificat d’épreuve en 2012. […] L’ASN a demandé à Areva NP de lui transmettre un dossier présentant la démarche qu’elle compte adopter afin de justifier la conformité de ce générateur de vapeur à la réglementation.”
Les générateurs de vapeur sont des équipements particulièrement importants pour la sûreté car ils participent au refroidissement du cœur du réacteur et au confinement des substances radioactives. En 2008, au cours du forgeage de la virole basse en question, Creusot Forge a décidé de ne pas couper une des deux extrémités du lingot, appelée « masselotte », car la longueur était trop courte, mais poursuit la fabrication. La majeure partie de celle-ci est donc présente dans la pièce finale, ce qui peut conduire à la présence d’inclusions dans l’acier et à une composition chimique locale du matériau pouvant dégrader sa soudabilité, son vieillissement et ses propriétés mécaniques. Voir l’extrait du dossier Areva et les photos explicatives dans cette présentation ASN (lien direct, copie).
Ce réacteur a été mis à l’arrêt le 13 juin 2016. La suspension du certificat d’épreuve entraîne le maintien à l’arrêt du réacteur n°2 de Fessenheim.
Un problème similaire affecte un générateur de vapeur de l’EPR de Flamanville 3 : le chutage de la masselotte prévu en cours de forgeage n’a pas été suffisant sur la virole basse (10% au lieu de 22% minimum). Cette virole aurait dû être rebutée. Mais le dossier remis à l’ASN jusqu’en juillet 2016 indique un taux de chutage de 23% !
Liens directs vers le communiqué, la note technique (copie) et la décision de l’ASN (copie). Voir aussi la présentation faite le 25 octobre 2016 devant l’OPECST (lien direct, copie).
Les analyses effectuées par Areva et EDF concernant ces pièces ne sont pas publiques.
23 septembre 2016 : l’ASN publie la liste des irrégularités détectées à ce stade à l’usine Creusot Forge d’Areva NP
Selon l’ASN, “Areva NP a identifié 87 irrégularités portant sur les réacteurs en fonctionnement d’EDF, 20 portant sur des équipements destinés au réacteur EPR de Flamanville, une concernant un générateur de vapeur non encore installé destiné au réacteur 5 de la centrale nucléaire de Gravelines et 4 portant sur des emballages de transport de substances radioactives. EDF a indiqué à l’ASN avoir terminé la caractérisation des irrégularités affectant ses réacteurs en fonctionnement. EDF conclut que ces irrégularités n’ont pas de conséquence sur la sûreté des réacteurs concernés.”
Pour 21 cas, l’ASN a conclu que les écarts identifiés ne remettent pas en cause la sûreté des équipements concernés. Elle poursuit l’examen du cas portant sur un générateur de vapeur du réacteur 4 de la centrale nucléaire du Bugey, actuellement à l’arrêt.
“En tout état de cause, indépendamment de leurs conséquences réelles sur la sûreté, ces irrégularités mettent en lumière des pratiques inacceptables.”
Liens directs vers la note d’information et vers la liste des 87 irrégularités (copie)
L’ASN a prescrit à EdF, le 15 septembre 2017, la revue de tous les dossiers de Creusot-Forge, même les “dossiers non barrés”. La fin de revue est prévue pour décembre 2018.
29 septembre 2016 : Greenpeace publie un rapport sur les irrégularités et anomalies relatives aux composants forgés de Creusot Forge
Résumé en français (communiqué, lien direct, copie) et rapport en anglais (lien direct, copie)
7 octobre 2016 : EDF a transmis à l’ASN un dossier de justification pour les fonds de générateurs de vapeur JCFC 120 tonnes
Ce dossier n’est pas public. Source : présentation EDF (lien direct).
14 octobre 2016 : des associations portent plainte contre Areva et EDF à propos du générateur de Fessenheim 2
Les associations Greenpeace France, Réseau « Sortir du nucléaire », Stop Transports-Halte au nucléaire, Stop Fessenheim, CSFR, Alsace Nature et France Nature Environnement ont déposé une plainte contre Areva et EDF suite à la découverte d’une grave irrégularité sur le réacteur 2 de Fessenheim. Les associations reprochent à Areva et EDF d’avoir mis en service un équipement à risques ne satisfaisant pas aux exigences de sûreté et accusent EDF d’avoir tardé à déclarer cette anomalie à l’ASN. EDF aurait en effet dissimulé cette irrégularité à l’ASN pendant un mois entre mai et juin 2016. Elles portent aussi plainte pour mise en danger délibérée de la vie d’autrui.
Source Greenpeace France : lien direct.
18 octobre 2016 : l’ASN prescrit l’arrêt de cinq réacteurs nucléaires afin de réaliser, sous trois mois, des contrôles sur les générateurs de vapeur dont l’acier présente une concentration élevée en carbone
Sur les 18 réacteurs qui sont équipés des 46 générateurs de vapeur concernés par une anomalie carbone (9 de ces réacteurs sont à l’arrêt au 30 septembre), 12 sont équipés de fonds primaires fabriqués par JCFC susceptibles de présenter une concentration en carbone particulièrement élevée. L’ASN a conclu qu’il était nécessaire de réaliser des contrôles complémentaires sous trois mois, sans attendre les arrêts programmés des réacteurs pour renouvellement du combustible. Ces contrôles ont été réalisés ou étaient en cours pour 7 de ces réacteurs. Les 5 autres devront être arrêtés pour effectuer les contrôles.
Dans une note d’information, l’IRSN explique que “de par leur fabrication, les fonds de générateur de vapeur de JCFC sont décarburés en surface extérieure, ce qui interdit les mesures de concentration de carbone sur ces surfaces. Ces mesures sont cependant possibles au voisinage des tubulures usinées ainsi qu’au niveau d’un méplat présent uniquement en partie inférieure des fonds de générateur de vapeur issus d’un lingot de 120 t. Les mesures réalisées sur le méplat des générateurs de vapeur des réacteurs n°1 et 3 de Tricastin montrent des concentrations de carbone atteignant 0,39% (les valeurs mesurées jusque-là ne dépassaient pas 0,32% et restaient proches de celles rencontrées pour les calottes hémisphériques de la cuve de l’EPR de Flamanville). Ces valeurs remettent donc en cause les hypothèses retenues jusqu’alors. Ces deux réacteurs sont actuellement à l’arrêt.”
La valeur limite est de 0,22%. L’IRSN ne dispose pas à ce stade de données sur le comportement des matériaux à de tels niveaux de concentration de carbone. Les connaissances sur le comportement de ces matériaux nécessitent notamment des essais sur des pièces sacrificielles.
Liens directs vers le communiqué de presse de l’ASN et vers sa décision (copie), ainsi que vers la note d’information de l’IRSN.
On ne connait pas les résultats pour les générateurs de vapeur où les mesures ont déjà été faites. Certains réacteurs concernés, notamment ceux avec des générateurs de vapeur fabriqués par Creusot Loire, ont redémarré. La décision ASN et sa justification ne sont pas publiques.
20 octobre 2016 : le président de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a saisi le procureur de la République dans l’affaire des « irrégularités » constatées à l’usine d’Areva au Creusot
L’article 40 du Code de procédure pénale prévoit que tout officier public ou fonctionnaire ayant connaissance d’un crime ou d’un délit dans le cadre de ses fonctions est tenu d’en “donner avis sans délai au procureur de la République”. Le signalement a été adressé au parquet de Chalons-sur-Saône.
25 octobre 2016 : audition de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) dédiée au contrôle des équipements sous pression nucléaires
Exemple d’irrégularité concernant un générateur de vapeur destiné à Gravelines 5 présenté par l’ASN lors de cette audition :
Lors de cette audition, le président de l’ASN a déclaré : “Il y a deux pratiques inacceptables dans ce dossier : il y a le fait de ne pas en parler à son client ou à l’autorité de sûreté concernée. Il y en a une autre (…), c’est qu’il y a un certain nombre de documents qui s’apparentent à des falsifications”.
Liens directs vers le programme, la vidéo de la réunion, la présentation de l’IRSN et celle de l’ASN.
15 novembre 2016 : l’ASN demande à Areva TN de garantir la sûreté des pièces forgées utilisées pour le transport de matières radioactives
Suite à une inspection qui a eu lieu le 7 novembre 2016 dans les locaux d’Areva Creusot Forge sur le thème de la fabrication des emballages de transport, l’ASN a demandé des garanties supplémentaires à Areva TN. En effet, Areva Creusot Forge intervient de longue date comme sous-traitant de la société Areva TN pour la fabrication de certains composants d’emballages de transport de substances radioactives couverts par un agrément de l’ASN.
Des emballages de transport sont concernés par les irrégularités découvertes chez Creusot Forge. L’ASN estime que les actions engagées par Areva TN n’ont pas permis de détecter l’ensemble des irrégularités. Elle a aussi découvert plusieurs non-conformités non détectées par la société Areva TN dans les dossiers de fabrication de l’usine Creusot Forge et elle rappelle que tant que ces non-conformités n’auront pas été soldées, les emballages concernés ne pourront pas être considérés conformes aux certificats d’agrément de leurs modèles et ils ne pourront donc pas servir au transport de substances radioactives.
Par ailleurs, il n’a pas pu être présentée d’analyse justifiant que les pièces forgées constituant les emballages de transport fabriqués au Creusot ne pouvaient pas être concernées par les problèmes de concentrations excessives en carbone affectant certaines pièces du parc nucléaire français. Or, les inspecteurs ont noté que les lingots d’acier utilisés pour la fabrication des emballages étaient très massiques, certains atteignant les 150 tonnes, et que certaines pièces, comme les fonds, sont écrasées sans être percées. Ces situations sont favorables à la persistance de concentrations excessives résiduelles de carbone dans la pièce finale.
Lien direct vers la lettre d’inspection et copie.
28 novembre au 2 décembre 2016 : inspection multinationale
d’AREVA NP dans son usine de Creusot Forge
Cette inspection, pilotée par l’ASN, rassemblait des inspecteurs des autorités de sûreté américaine, britannique, canadienne, chinoise et finlandaise. L’objectif était d’examiner la méthode de revue des dossiers des composants déjà évalués et ceux en cours d’évaluation et d’examiner les modifications organisationnelles, techniques ainsi qu’en matière de culture de qualité et de sûreté nucléaire, mises en œuvre au sein de l’usine de Creusot Forge.
Le rapport daté du 16 décembre 2016 de l’Office for Nuclear Regulation (ONR), l’autorité de sûreté britannique, rendu public le 31 mars 2017 par France Inter, mentionne que la culture de sûreté à Creusot Forge est bien inférieure aux niveaux attendus par les autorités pour un fournisseur important de l’industrie nucléaire. Les mesures d’amélioration mises en place à ce jour doivent encore être effectives. Et l’ONR de s’interroger de la pertinence du choix de Creusot Forge pour forger des pièces destinées aux EPR de Hinkley Point C. Lien direct vers le document de l’ONR (copie).
La lettre de suite de l’ASN de cette inspection est datée du 31 janvier 2017. On peut y lire notamment : “Les inspecteurs ont toutefois noté que l’analyse des causes de la non-détection de ces irrégularités par le système qualité et les organes d’inspection internes n’a pas été réalisée à ce jour. Cette analyse est essentielle pour garantir la complétude et la pertinence des améliorations qui doivent être mises en place pour éviter que ce type d’irrégularités ne se reproduise.” Et d’ajouter : “Les irrégularités que vous avez détectées dans les dossiers de pièces fabriquées dans votre usine de Creusot Forge mettent en lumière des pratiques inacceptables. Les inspecteurs ont relevé que le niveau de culture de sûreté nucléaire actuel au sein de Creusot Forge n’a pas été évalué et qu’aucun critère d’évaluation n’a été défini […]. Dans ce contexte, vous n’apportez pas de justification sur le fait que le niveau de culture de qualité et de sûreté nucléaire actuel au sein de Creusot Forge est acceptable. Vous ne justifiez pas non plus que la culture de sûreté nucléaire au sein de votre usine est en constante amélioration comme le prévoient les prescriptions 12 et 13 de l’AIEA définies dans le référentiel General Safety Requirements Part II.” (Lien direct). Les documents Areva cités ne sont pas publics.
5 décembre 2016 : l’ASN considère que le redémarrage de certains réacteurs concernés par une concentration élevée en carbone dans l’acier des générateurs de vapeur peut être envisagé
EDF a transmis à l’ASN, par courriers des 7 octobre et 15 novembre 2016, un dossier générique destiné à justifier l’aptitude au service des fonds primaires de générateur de vapeur fabriqués par JCFC équipant des réacteurs de 900 MWe. Ces courriers et dossiers ne sont pas publics. Pour l’ASN, les hypothèses du dossier d’EDF devront être confirmées par un programme d’essais sur des pièces sacrificielles représentatives.
Pour être autorisée à redémarrer ces réacteurs, conformément à la demande des autorités, EDF a défini des mesures compensatoires mises en œuvre en exploitation telles que la limitation à 14 °C/h de la vitesse de refroidissement du circuit primaire lors de la mise à l’arrêt du réacteur afin de limiter l’amplitude des chocs thermiques envisageables. L’ASN considère que, sous réserve de la prise en compte de ses demandes, les justifications génériques apportées par EDF sont acceptables pour les réacteurs de 900 MWe et peuvent être utilisées sur chacun des réacteurs concernés en vue de l’autorisation de leur redémarrage. Chaque redémarrage de réacteur reste par ailleurs soumis à l’accord de l’ASN au vu d’un dossier spécifique.
Liens directs vers le communiqué de presse de l’ASN et la vidéo de la conférence de presse, le courrier de l’ASN adressé à EDF, le communiqué de l’IRSN, sa note d’information et son avis daté du 30 novembre 2016.
Pour les générateurs de vapeur fabriqués par Creusot Loire, la décision de l’ASN et sa justification n’ont pas été publiées.
6 décembre 2016 : dans un avis concernant les générateurs de vapeur, le HCTISN demande que les documents échangés entre l’ASN et l’exploitant soient communiqués, sous réserve des secrets protégés par la loi.
Suite à cette demande, l’ASN a mis en ligne ses courriers, mais pas EdF.
Lien direct vers l’avis.
7 décembre 2016 : le parquet de Paris ouvre une enquête sur des anomalies de fabrication de pièces de réacteurs nucléaires de l’usine Areva du Creusot et des irrégularités dans les processus de suivi
Suite au signalement de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) le 20 octobre, le pôle santé publique du parquet de Paris a ouvert une enquête pour mise en danger d’autrui, faux et usage de faux et tromperie aggravée. Les investigations ont été confiées à la Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) et à l’Office spécialisé contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp).
9 décembre 2016 : EDF est autorisée par l’ASN à modifier temporairement les règles générales d’exploitation de certains réacteurs
Par décision CODEP-DCN-2016-048322 (lien direct, copie) de l’ASN, EDF est autorisée à modifier temporairement les règles générales d’exploitation des réacteurs n° 1 de Fessenheim, n° 4 du Bugey, n° 3 de Dampierre, n° 2 et 4 de Gravelines, n° 1 de Saint-Laurent, n° 1 à 4 de Tricastin.
La seule information disponible sur cette modification est qu’elle est relative à l’aptitude au service des fonds primaires de générateur de vapeur fabriqués par JCFC et qu’elle répond au courrier d’EDF-SA référencé D455016079691 du 8 décembre 2016 qui n’est pas public. Les modifications devraient être publiques.
10 janvier 2017 : l’US Nuclear Regulatory Commission met en ligne la liste des réacteurs et pièces forgées affectés par les problèmes de ségrégation carbone et les irrégularités à Creusot Forge, malgré l’opposition d’Areva
17 réacteurs américains de 13 centrales nucléaires ont des pièces forgées à Creusot Loire potentiellement affectées par les problèmes de ségrégation carbone et les irrégularités dans l’assurance qualité. Areva s’est opposé à la publication de la liste des pièces et des réacteurs affectés, mais la NRC est passée outre et a mis la liste en ligne.
Liens directs vers le communiqué, le document Areva mis en ligne (copie) et l’avis de la NRC concernant cette publication.
12 janvier 2017 : l’ASN autorise le redémarrage de neuf réacteurs équipés de générateurs avec un fond primaire fabriqué par JCFC
L’ASN annonce avoir donné son accord au redémarrage de neuf des douze réacteurs concernés par l’anomalie de la concentration en carbone de l’acier des fonds primaires des générateurs de vapeur fabriqués par JCFC après examen des résultats des contrôles réalisés et des justifications techniques apportées par EDF pour les réacteurs de 900 MWe. Le 18 octobre 2016, l’ASN avait prescrit à EDF de réaliser, sous trois mois, des contrôles complémentaires.
Par ailleurs, l’ASN a donné une suite favorable à la demande d’EDF de reporter de deux semaines l’échéance des contrôles pour le réacteur Tricastin 2 à cause des risques pour la sécurité du réseau électrique liés à la vague de froid attendue. L’ASN a considéré ce report comme acceptable au regard de la sûreté et a fixé au 3 février 2017 la nouvelle échéance.
EDF a également sollicité le report à fin mars 2017 de l’échéance des contrôles prescrits pour le réacteur Civaux 1. L’ASN annonce qu’elle prendra bientôt position sur cette demande de report et sur les conditions de redémarrage du réacteur 2, sur lequel les contrôles ont été réalisés. Ce sont tous les deux des 1450 MWe.
Liens directs vers le communiqué de l’ASN, sa décision et son courrier à EDF concernant Civaux. Les résultats des contrôles effectués par EDF, ses demandes de report et le courrier de la directrice de l’énergie du ministère de l’environnement, de l’énergie et de la mer du 12 janvier 2017 relatif à la sécurité d’approvisionnement électrique, mentionnés dans la décision de l’ASN ne sont pas publics.
17 janvier 2017 : l’ASN autorise le report de l’arrêt du réacteur Civaux 1 en vue de faire des contrôles sur les fonds primaires de générateurs de vapeur fabriqués par Japan Casting and Forging Corporation (JCFC) à cause des risques pour la sécurité d’alimentation pendant la vague de froid
Le 18 octobre 2016, l’ASN avait prescrit à EDF de réaliser, sous trois mois, des contrôles complémentaires sur les fonds primaires de générateurs de vapeur fabriqués par Japan Casting and Forging Corporation (JCFC) qui présentent un risque de ségrégation carbone. EDF, soutenue par la Direction Générale de l’Energie et du Climat, a demandé un report de cet arrêt pour faire face à la demande électrique pendant cette période de grand froid. L’ASN considère que la prorogation du délai prescrit répond ainsi à un motif de sécurité publique et fixe la nouvelle date limite au quinzième jour suivant le couplage au réseau électrique du réacteur n° 2 de cette même centrale nucléaire et au plus tard au 17 mars 2017.
Lien direct vers la décision de l’ASN. La demande d’EDF et le courrier du ministère ne sont toujours pas publics.
Les conditions d’exploitation autorisées du site électronucléaire de Civaux ont aussi été modifiées de façon notable (lien direct) sans que l’on connaisse le détail, ni la demande faite par EDF.
L’IRSN a mis en ligne ses avis correspondant au maintien en service des fonds primaires fabriqués par Japan Casting and Forging Corporation des générateurs de vapeur équipant les réacteurs de Civaux 1 et Civaux 2 (lien direct) et aux mesures compensatoires mises en place pour faire face à ces anomalies (lien direct).
7 février 2017 : le collège de l’ASN, après consultation de la présidente de la CLI de Flamanville, donne un avis favorable au projet de décret de prolongation à 13 ans du délai fixé pour la mise en service de l’EPR de Flamanville
Dans un courrier daté du 30 janvier 2017, l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) a saisi la Présidente de la CLI de Flamanville à propos du projet de modification du décret d’autorisation de création de l’installation nucléaire de base dénommée « Flamanville 3 ». Selon l’ASN, « l’objectif de cette modification est de porter à 13 ans, contre 10 aujourd’hui, le délai fixé par le décret pour la mise en service de l’installation. » Cette modification ne fait pas l’objet d’une consultation sur Internet, mais la CLI a consulté ses membres.
La notice du projet de décret précise que « la construction du réacteur nucléaire de type EPR de Flamanville a pris du retard en raison d’aléas de construction. Le nouveau calendrier annoncé par Electricité de France prévoit une mise en service de ce réacteur pour le dernier trimestre 2018. L’article 3 du décret du 10 avril 2007 autorisant la création de l’installation nucléaire de base dénommée Flamanville 3, comportant un réacteur nucléaire de type EPR, sur le site de Flamanville (Manche) prévoyait un délai de mise en service de dix ans à compter de la publication de ce décret. Le présent décret modifie ce délai à treize ans. » Sans prolongation, EDF doit reprendre toute la procédure administrative à zéro.
Cette prolongation a fait l’objet d’un marchandage avec EDF en échange de l’arrêt de la centrale de Fessenheim. Comme pour Paluel, où un générateur de vapeur était tombé en 2016, un arrêté proroge la durée de l’arrêt de fonctionnement pour éviter l’arrêt définitif du réacteur.
L’ASN a finalement donné un avis favorable à cette prolongation. Voir la copie de l’avis et du résultat de la consultation (les adresses mails ont été noircies par l’ACRO). Lire aussi l’avis de l’ACRO transmis à la CLI de Flamanville.
3 mars 2017 : selon la presse, EDF reporte le redémarrage du réacteur de Fessenheim 2 à l’arrêt à cause des irrégularités sur un des générateurs de vapeur qui a perdu son certificat d’épreuve le 18 juillet 2016
L’arrêt serait prolongé jusqu’à la fin juillet 2017. Rien sur le site d’EDF.
13 mars 2017 : L’ASN donne son accord au redémarrage des trois derniers réacteurs concernés par l’anomalie de la concentration en carbone de l’acier des fonds primaires des générateurs de vapeur fabriqués par JCFC.
Les résultats des contrôles et les justifications apportées par EDF sur l’aptitude au service de ces générateurs de vapeur ont conduit l’ASN à autoriser le redémarrage du dernier réacteur concerné, le réacteur 1 de la centrale nucléaire de Civaux, le 24 février 2017 (lien direct vers la fiche correspondante). EDF annonce une remise en service le 1er mars, sans aucune information technique. Le 17 janvier dernier, l’ASN avait autorisé le report des contrôles à cause de la vague de froid qui avait entraîné une forte demande en électricité.
Les mêmes mesures compensatoires s’appliquent (cf 5 décembre 2016).
L’ASN publie par ailleurs la chronologie de ses échanges sur cette anomalie avec EDF. Elle met également à la disposition du public les courriers qu’elle a envoyés à EDF.
Lien direct vers le communiqué de l’ASN et les documents associés.
En revanche, les résultats des contrôles effectués par EDF et les justifications apportées pour obtenir une autorisation de redémarrage ne sont pas publics, malgré la demande du Haut Comité pour la Transparence et l’Information sur la Sécurité Nucléaire, qui dans son avis du 6 décembre 2016 (lien direct), demande “que les documents échangés entre l’ASN et l’exploitant soient communiqués, sous réserve des secrets protégés par la loi.”
23 mars 2017 : le décret n° 2017-379 du 23 mars 2017 modifie l’autorisation de création du réacteur EPR de Flamanville
Le décret n° 2007-534 du 10 avril 2007 a autorisé la création de l’installation nucléaire de base dénommée Flamanville 3, comportant un réacteur nucléaire de type EPR, sur le site de Flamanville (Manche). Son article 3 fixait à dix ans le délai pour réaliser le premier chargement en combustible nucléaire du réacteur à compter de la publication du présent décret au Journal officiel de la République française.
Le nouveau décret stipule que « dix » est remplacé par « treize ». EDF n’aura pas à recommencer toute la procédure administrative. Est-ce que 3 années supplémentaires suffiront ?
31 mars 2017 : suite à une enquête de France-Inter, l’ASN publie l’historique de ses échanges avec EDF et Areva NP sur la qualité des fabrications de Creusot Forge depuis 2005
Suite à la publication de l’enquête de France-Inter, “Cuve de l’EPR de Flamanville : l’incroyable légèreté d’Areva et EDF“, qui révèle que dès 2005 l’ASN alertait EDF sur la qualité des fabrications de Creusot Forge, l’ASN met en ligne l’historique de ses échanges avec EDF et Areva NP sur ce sujet. L’historique publié détaille 49 inspections réalisées par l’ASN sur le site du Creusot depuis 2005, et précise le thème et les dates de ces contrôles. L’ASN rend aussi publics 6 courriers, dont les deux révélés par France-Inter.
Les réponses d’EDF et Areva ne sont pas publiques.
Lien direct vers la page correspondante. Lien direct vers l’historique et copie.
12 mai 2017 : Areva et EDF ont mis en ligne des pages internet dédiées au problème la cuve de l’EPR, les générateurs de vapeur et une note de synthèse technique
Areva a mis en ligne la note de synthèse relative à la ténacité des calottes du fond et du couvercle de la cuve de l’EPR de Flamanville 3. Areva s’était engagée devant le HCTISN à rendre publics 3 rapports techniques sur 22. Il n’y en a qu’un de publié et une vingtaine de pages sont noircies.
La compagnie a aussi mis en ligne des pages très vulgarisées avec peu d’informations.
Liens directs vers les pages dédiées d’Areva et vers la note de synthèse (copie). Lien vers les pages dédiées d’EDF.
22 juin 2017 : Rapport intermédiaire et avis du Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire (HCTISN)
Ce rapport est assorti d’un avis et de recommandations relatifs aux mesures d’information du public et de transparence sur les anomalies de fabrication de la cuve EPR de Flamanville 3 et a été validé par le Haut Comité lors de sa réunion extraordinaire du 14 juin 2017. Outre le rapport et les CR de réunion, le HCTISN met en ligne une reconstitution historique par l’ASN (déjà en ligne sur le site de l’ASN), Areva et EDF. Areva et EDF s’y étaient initialement opposés.
On peut lire, notamment, que
- « Le HCTISN note que la communication réalisée par l’exploitant EDF et le fabricant AREVA à destination du public sur ce sujet est plus succincte. »
- « Le HCTISN considère qu’AREVA et EDF devraient rendre publiques les réponses aux courriers que l’ASN leur a adressés depuis 2006 sur la fabrication de la cuve, afin d’améliorer la compréhension du public sur ce dossier. »
- « Le HCTISN estime également qu’une communication de la part d’EDF et d’AREVA auprès du public sur les scénarios techniques alternatifs envisagés dans le cas où l’instruction conduirait à ne pas accepter le couvercle et le fond de cuve permettrait également de compléter son information sur l’ensemble du dossier et notamment sur les conséquences potentielles liées à l’anomalie de la cuve. »
-
« Le HCTISN recommande en particulier à EDF et AREVA de rendre public le rapport définitif des analyses effectuées dans le cadre de la démarche de justification de l’aptitude à la mise en service de la cuve de l’EPR sur la base duquel l’ASN donnera sa position et d’informer le public des solutions alternatives envisagées si l’aptitude à la mise en service de la cuve n’est pas démontrée. »
Lien direct vers la page dédiée du HCTISN.
Dans un communiqué, l’ACRO demande aussi la publication de l’ensemble des pièces du dossier. Greenpeace, dans un communiqué, estime qu’ “il est encore temps pour l’ASN de se montrer intransigeante sur la sûreté nucléaire, de résister aux pressions subies par EDF et AREVA et donc de refuser de valider la cuve et le couvercle de l’EPR de Flamanville.”
26 et 27 juin 2017 : Réunion du Groupe permanent équipements sous pression nucléaire (GPESPN) dédiée à la cuve de l’EPR
Lire notre article relatif aux principales conclusions à l’issue de de cette réunion.
Le lendemain, l’ASN et l’IRSN ont tenu une conférence de presse et mis en ligne leurs avis et rapports d’analyse.
Lien direct vers la page de l’ASN, avec l’avis du GP ESPN.
Lien direct vers la page de l’IRSN.
L’ASN “établira ensuite un projet de position qu’elle soumettra à la consultation du public jusqu’au mois de septembre 2017. Elle prendra définitivement position à la fin de cette consultation.”
10 juillet 2017 : l’ASN lance une consultation sur le projet d’avis relatif à l’anomalie de la composition de l’acier du fond et du couvercle de la cuve du réacteur EPR de la centrale nucléaire de Flamanville
La consultation se fait par voie électronique sur le site Internet de l’ASN pour une durée de 65 jours à compter du 10/07/2017. Les observations peuvent être faites jusqu’à la date du 12/09/2017.
Les observations reçues feront l’objet d’une synthèse qui précisera notamment les suites données à la consultation et qui sera rendue publique au plus tard à la date de publication de l’avis, prévue pour octobre 2017.
Le projet d’avis fait référence à des engagements d’Areva et d’EDF formulés dans des courriers qui ne sont pas publiés. Comment le public peut-il avoir un avis sur le sujet ?
Lien direct vers la consultation et le projet d’avis.
13 juillet 2017 : mise en ligne par le HCTISN des notes EDF et AREVA NP relatives à l’aptitude au service des fonds primaires de générateur de vapeur fabriqués par JCFC
Le HCTISN avait adopté à l’unanimité, lors de sa réunion plénière du 6 décembre 2017, son avis numéro 8 demandant, notamment “que les documents échangés entre l’ASN et l’exploitant soient communiqués, sous réserve des secrets protégés par la loi.” L’ACRO s’était battue pour que cette phrase apparaisse. L’ASN a rapidement mis en ligne ses courriers relatifs à ce problème. Areva et EDF ont, en mars 2017, transmis au Haut Comité, leur propres documents. Il aura encore fallu que l’ACRO insiste pour leur mise en ligne.
Le 13 juillet, le HCTISN a finalement mis en ligne, sur une page spéciale tous les documents reçus d’EDF et Areva (lien direct).
Ces documents ont été largement caviardés et ne contiennent aucune donnée chiffrée. La transparence reste un long combat…
16 août 2017 : l’ASN demande à EDF l’examen de l’ensemble des dossiers de fabrication des équipements installés sur ses réacteurs en fonctionnement provenant de l’usine Creusot Forge d’Areva NP
Suite à la découverte, en 2016, d’irrégularités, dont certaines s’apparentent à des falsifications, dans des dossiers de fabrication d’équipements sous pression nucléaires fabriqués par l’usine Creusot Forge, Areva et EDF ont lancé une revue de l’ensemble des dossiers de fabrication de cette usine. Dans ce projet de décision, soumis à la consultation du public, l’ASN s’assure que le processus de revue est conduit à son terme et impose un calendrier : il doit être achevé au plus tard le 31 décembre 2018 et le programme doit être transmis à l’ASN au plus tard le 31 octobre 2017. Cette revue a pour objectif d’identifier les éventuelles irrégularités et l’ensemble des écarts et elle concerne l’ensemble des dossiers de fabrication des équipements installés sur les réacteurs en fonctionnement des 19 centrales nucléaires françaises.
Il est possible de donner son avis sur le site de l’ASN jusqu’au 10 septembre 2017 : lien direct vers le projet de décret et la consultation.
24 août 2017 : selon les médias, EDF aurait découvert de nouvelles anomalies sur des pièces provenant de l’usine Creusot-Forge
Selon la presse, EDF aurait transmis à l’ASN neuf nouveaux dossiers relatifs à des irrégularités sur des pièces provenant de Creusot-Forge. “Ces dossiers mettent en évidence de nouveaux écarts identifiés dans les dossiers de fabrication ”, selon le communiqué transmis à l’AFP. Et d’ajouter que “l’analyse de ces écarts montre qu’aucun n’est de nature à remettre en question l’aptitude au fonctionnement en toute sûreté des équipements concernés ”.
Comme d’habitude, aucune précision n’est disponible sur le site d’EDF. La compagnie a été épinglée par le HCTISN pour son manque de transparence, mais ne change pas ses pratiques.
10 et 12 septembre 2017 : fin des consultations lancées par l’ASN
La consultation sur le projet d’avis relatif à l’anomalie de la composition de l’acier du fond et du couvercle de la cuve du réacteur EPR de la centrale nucléaire de Flamanville, lancée le 10 juillet, aurait recueilli plus de 13 000 contributions, selon l’ASN. La grande majorité demandent l’abandon du réacteur EPR, voire du nucléaire. La contribution de l’ACRO est ici.
L’autre consultation, relative à l’examen de l’ensemble des dossiers de fabrication, n’a reçu “que” 676 commentaires, dont certains concernaient plutôt la cuve de l’EPR.
19 septembre 2017 : la revue des dossiers de fabrication des composants de réacteurs EDF forgés dans l’usine Creusot Forge a conduit à la détection de 712 écarts de conformité et ce n’est pas fini…
L’ASN communique sur la revue des dossiers de fabrication des composants de réacteur nucléaire fabriqués sur les sites du Creusot. Cette revue étendue a pour objectif de détecter tout élément constituant un écart, soit par rapport aux exigences du référentiel technique choisi par le fabricant ou aux exigences internes à l’usine, soit aux exigences contractuelles ou réglementaires applicables au moment de la fabrication.
EdF a déjà transmis les bilans de la revue des dossiers de fabrication de douze réacteurs (Chooz B2, Paluel 4, Saint-Laurent-des-Eaux B2, Penly 1, Cruas 3, Dampierre 3, Belleville 2, Tricastin 3, Chinon B3, Nogent 1, Gravelines 2 et Bugey 3) dont le redémarrage, à la suite d’un arrêt pour renouvellement du combustible, est prévu entre septembre et novembre 2017. A ce stade, cette revue a conduit à la détection de 601 écarts de conformité.
Pour les autres réacteurs, l’ASN prescrit à EDF, par sa décision n° 2017-DC-0604 du 15 septembre 2017, de lui transmettre le bilan de la revue des dossiers de fabrication au plus tard deux mois avant le redémarrage prévu à la suite de leur arrêt pour renouvellement du combustible. L’ASN conditionnera leur redémarrage aux résultats de son analyse.
L’ASN prescrit également à EDF d’étendre le champ de la revue aux composants moulés (et pas seulement forgés) ainsi qu’aux autres composants importants – mais non nucléaires – fabriqués sur les sites du Creusot et aujourd’hui installés sur des réacteurs en fonctionnement.
Lien direct vers la décision du 15 septembre 2017.
Areva explique la démarche suivie pour la revue de 6 000 dossiers concernant l’industrie nucléaire, dont 1 600 le parc EdF en exploitation, mais ne donne pas de détails relatifs aux résultats de ces investigations (lien direct).
EdF fait un décompte des écarts de conformité en distinguant les “non-conformités” qui portent sur une exigence interne au fabricant des “anomalies” relatives aux exigences externes réglementaires ou du client. Certaines anomalies s’apparentent à des falsifications, selon l’ASN.
réacteur | nombre de pièces fabriquées par Creusot Forge | non conformités | anomalies |
Chooz 2 | 27 | 3 | 43 |
Paluel 4 | 35 | 22 | 55 |
Saint-Laurent 2 | 25 | 8 | 38 |
Penly 1 | 33 | 17 | 27 |
Cruas 3 | 18 | 3 | 16 |
Dampierre 3 | 29 | 3 | 50 |
Belleville 2 | 33 | 23 | 46 |
Tricastin 3 | 24 | 4 | 28 |
Chinon B3 | 18 | 14 | 20 |
Nogent 1 | 30 | 13 | 32 |
Gravelines 2 | 23 | 1 | 23 |
Bugey 3 | 34 | 19 | 93 |
TOTAL | 329 | 130 | 471 |
L’EPR de Flamanville 3 est aussi concerné avec 16 non-conformités et 95 anomalies. EdF précise que :
- 8 situations nécessitent des analyses complémentaires : reprise de quelques notes de calcul ou réalisation de quelques essais de validation, ces justifications sont en cours de finalisation par AREVA ;
- 1 situation concernant le positionnement dans le lingot de forge servant à la fabrication d’une virole pour un des générateurs de vapeur, qui nécessite un programme d’essais fondé sur une pièce sacrificielle. Ce programme d’essais est en cours, sous le contrôle de l’ASN.
La liste de tous ces écarts de conformité n’est pas publique, comme d’habitude…
2 au 4 octobre 2017 : enquête de Reporterre sur Creusot-Loire
Liens directs vers :
- premier épisode : La très étrange transaction de 170 millions d’euros entre Areva et M. Bolloré
- deuxième épisode : Derrière le fiasco de l’EPR, les errements du Creusot sous la responsabilité de M. Bolloré et d’Areva
- troisième épisode : Dans l’usine du Creusot, trois décennies de gestion défaillante
11 octobre 2017 : l’ASN rend son avis sur la cuve de l’EPR
Suite à la consultation sur son avis provisoire, qui a recueilli plus de 13 000 commentaires, l’ASN a rendu son avis définitif sur la cuve de l’EPR. A noter, qu’outre les commentaires individuels, l’ANCCLI, l’ACRO et la CLI de Flamanville ont également fait part de leurs observations.
Le bilan que l’ASN tire de ces 13 833 commentaires tient en 4 lignes : “L’ASN a complété et précisé son avis, vu les différentes observations du public, en particulier s’agissant de la démarche de justification, du cadre réglementaire applicable et de fiabilité des données provenant d’Areva NP et d’EDF.”
Quant à l’avis, voici les deux versions :
Projet d’avis avant consultation | Avis après consultation |
L’anomalie de la composition en carbone de l’acier du fond et du couvercle de la cuve du réacteur EPR de Flamanville n’est pas de nature à remettre en cause la mise en service de celle-ci sous réserve des conditions suivantes. Des contrôles en service capables de détecter les défauts perpendiculaires aux peaux, quelle que soit leur orientation, dans les 20 premiers millimètres à partir des surfaces interne et externe du métal de base devront être mis en œuvre sur le fond de la cuve du réacteur EPR de Flamanville à chaque requalification complète du circuit primaire principal. L’utilisation du couvercle de la cuve du réacteur EPR de Flamanville ne pourra être autorisée au-delà du 31 décembre 2024. Les engagements d’Areva NP et d’EDF, formulés par les courriers des 6 et 9 juin susvisés, notamment en ce qui concerne le programme d’essais de suivi du vieillissement thermique et les contrôles lors du fonctionnement du réacteur, devront être intégrés dans la demande d’autorisation prévue à l’article 9 de l’arrêté du 30 décembre 2015. Areva NP devra confirmer, dans cette demande d’autorisation, les chargements mécaniques sur le couvercle dans la situation d’éjection de grappe. |
L’anomalie de la composition en carbone de l’acier du fond et du couvercle de la cuve du réacteur EPR de Flamanville n’est pas de nature à remettre en cause la mise en service et l’utilisation de celle-ci sous réserve des conditions suivantes.
Des contrôles en service capables de détecter les défauts perpendiculaires aux peaux, quelle que soit leur orientation, dans les 20 premiers millimètres à partir des surfaces interne et externe du métal de base devront être mis en œuvre sur le fond de la cuve du réacteur EPR de Flamanville à chaque requalification complète du circuit primaire principal. L’utilisation du couvercle de la cuve du réacteur EPR de Flamanville ne pourra être autorisée au-delà du 31 décembre 2024. Les engagements d’Areva NP et d’EDF, formulés par les courriers des 6 et 9 juin 2017 susvisés, notamment en ce qui concerne le programme d’essais de suivi du vieillissement thermique et les contrôles lors du fonctionnement du réacteur, devront être intégrés dans la demande d’autorisation prévue à l’article 9 de l’arrêté du 30 décembre 2015. Areva NP devra confirmer, dans cette demande d’autorisation, les chargements mécaniques sur le couvercle dans la situation d’éjection de grappe. |
Encore une consultation pour rien…
- Lien direct vers la page correspondante.
- Lien direct (copie) de l’avis définitif de l’ASN.
- Lien direct (copie) vers le projet d’avis.
- Lien direct (copie) vers le bilan de la consultation.
- Lien direct vers la page de la consultation.
30 novembre 2017 : plusieurs associations déposent un recours devant le Conseil d’État pour remettre en cause la décision de l’ASN relative à la cuve de l’EPR
Le Réseau “Sortir du nucléaire“, le CRILAN, Greenpeace France et “STOP EPR, ni à Penly ni ailleurs” ont déposé un recours devant le Conseil d’Etat pour remettre en cause la décision de l’ASN relative à la cuve de l’EPR.
- Lien direct vers le communiqué de presse
- Lien direct (copie) du recours déposé
25 janvier 2018 : l’ASN autorise la reprise des fabrications à l’usine de Creusot Forge sous conditions
L’ASN considère que les actions mises en œuvre à l’usine de Creusot Forge permettent la reprise de la fabrication de composants destinés aux installations nucléaires françaises sous certaines conditions. Dans sa lettre à Framatome, qui remplace Areva, l’ASN précise :
“Creusot Forge n’est pas en mesure, à ce jour, de disposer d’une surveillance interne. Pour pallier ce manque, conformément à vos engagements, une surveillance par l’entité d’inspection du secteur Réacteurs de Framatome sur toutes les opérations de la forge et de l’aciérie, avec un accès permanent des inspecteurs aux ateliers, devra être maintenue tant que vous n’aurez pas démontré que le service de surveillance interne à Creusot Forge est opérationnel ;
– il est nécessaire de s’assurer de l’efficacité des dispositions mises en place. Les résultats des essais mécaniques contribuent à cette assurance. Par conséquent il est impératif que ces derniers ne soient pas sujets à interprétation. Dans cette perspective, je vous demande de mettre à la disposition de l’exploitant, pour les composants que vous envisagez de fabriquer au sein de votre usine du Creusot, de la matière excédentaire représentative de celle utilisée pour les essais mécaniques réalisés. Cette matière permettra, le cas échéant, de vérifier par de nouveaux essais les valeurs que vous avez obtenues.”
L’ASN maintient à ce stade une surveillance renforcée de l’usine de Creusot Forge. Elle demande aussi que le forgeage de chaque type de composant (virole, calotte, tuyauterie, etc.) fasse l’objet d’une qualification technique préalable instruite par l’ASN afin de s’assurer de la capacité technique de l’usine.
L’ASN demande à EDF de s’assurer de l’efficacité du plan d’amélioration mis en œuvre par Framatome, notamment pour la prévention et la détection des fraudes et elle l’invite à adopter une démarche de transparence proactive vis-à-vis du public sur ces éléments. Aucun des courriers EDF n’étant publics, ce n’est pas encore gagné…
- Lien direct vers le communiqué de presse
- Lien direct (copie) vers le courrier à Framatome
- Lien direct (copie) vers le courrier à EDF
22 février 2018 : EDF annonce des “écarts de qualité” sur les soudures du circuit de l’EPR qui évacue la vapeur des générateurs de vapeur vers la turbine
Dans un communiqué, EDF annonce avoir détecté que des soudures du circuit secondaire de l’EPR qui évacue la vapeur des générateurs de vapeur vers la turbine n’avaient pas la qualité requise. La compagnie n’a pas informé les sous-traitants des exigences dite de « haute qualité » dans la réalisation de ces circuits. C’est ballot.
Ces écarts ont été identifiés en deux temps, d’abord en 2015, sur des soudures réalisées en usine, puis en 2017 sur les soudures réalisées sur le chantier de l’EPR de Flamanville 3, suite à une inspection de l’ASN.
EDF avait pourtant prescrit “un renforcement des exigences de conception, de fabrication et de suivi en service” selon le principe dit d’« exclusion de rupture » qui permet à l’exploitant de ne pas étudier intégralement les conséquences d’une rupture de ces tuyauteries dans la démonstration de sûreté de l’installation. L’exigence dite de « haute qualité » n’est donc pas garantie, mais la compagnie précise que “ces tuyauteries sont bien conformes à la réglementation des équipements sous pression nucléaire” et sont donc “aptes à assurer leur mission en toute sûreté”. Cependant, EDF “a engagé des analyses afin de démontrer que les caractéristiques mécaniques de ce circuit sont conformes à l’attendu”.
Si l’on résume, que ce soit pour la cuve de l’EPR ou le circuit secondaire, les exigences de sûreté renforcées sont rognées, mais tout va bien selon EDF.
L’ASN a exigé un dossier complet portant sur l’historique de la détection et du traitement de ces écarts et les différentes possibilités de traitement. Elle recueillera l’avis du groupe permanent d’experts pour les équipements sous pression nucléaires (GP ESPN) sur ce sujet au second semestre 2018.
- Communiqué d’EDF (lien direct)
- Note d’information de l’ASN (lien direct)
22 février 2018 : EDF a publié un nouveau bilan intermédiaire de la revue des pièces forgées au Creusot : 1 063 anomalies et 233 non-conformités sur 23 réacteurs
Suite à la découverte de nombreuses irrégularités chez Creusot Forge, devenue Framatome, EDF continue sa revue des pièces installées dans ses réacteurs. Un premier bilan avait été publié en septembre 2017. Un deuxième bilan vient d’être mis en ligne.
EdF fait un décompte des écarts de conformité en distinguant les “non-conformités” qui portent sur une exigence interne au fabricant des “anomalies” relatives aux exigences externes réglementaires ou du client. Certaines anomalies s’apparentent à des falsifications, selon l’ASN. Il y a désormais 1 063 anomalies et 233 non-conformités sur 23 réacteurs seulement. D’autres sont donc attendues.
Le détail est dans le tableau ci-dessous. En cas de changement, les chiffres de septembre 2017 sont entre parenthèses.
réacteur | nombre de pièces fabriquées par Creusot Forge | non conformités | anomalies |
Chooz 2 | 27 | 3 | 52 (43) |
Paluel 4 | 35 | 22 | 55 |
Saint-Laurent 2 | 25 | 8 | 61 (38) |
Penly 1 | 33 | 17 | 29 (27) |
Cruas 3 | 18 | 3 | 16 |
Dampierre 3 | 29 | 3 | 52 (50) |
Belleville 2 | 33 | 23 | 46 |
Tricastin 3 | 24 | 4 | 30 (28) |
Chinon B3 | 18 | 14 | 20 |
Nogent 1 | 30 | 13 | 32 |
Gravelines 2 | 23 | 1 | 23 |
Bugey 3 | 34 | 19 | 94 (93) |
Nouveaux réacteurs | |||
Fessenheim 2 | 17 | 11 | 50 |
Paluel 2 | 20 | 2 | 51 |
Cruas 2 | 18 | 14 | 35 |
Paluel 1 | 28 | 12 | 74 |
Cattenom 1 | 30 | 17 | 83 |
Blayais 2 | 15 | 8 | 35 |
Tricastin 4 | 24 | 3 | 32 |
Gravelines 4 | 21 | 0 | 25 |
Cattenom 3 | 33 | 27 | 48 |
Tricastin 1 | 24 | 8 | 54 |
Civaux 2 | 36 | 1 | 66 |
TOTAL | 595 | 233 | 1 063 |
Rappelons que l’EPR de Flamanville 3 est aussi concerné avec 16 non-conformités et 95 anomalies.
Selon EDF, 1 600 dossiers environ concernent des composants installés sur le parc nucléaire en exploitation. La revue est donc loin d’être terminée.
La liste de tous ces écarts de conformité n’est pas publique, comme d’habitude. Impossible de connaître la gravité de ces écarts. La transparence, c’est seulement quand tout va bien…
1er mars 2018 : Epinglée par le Canard Enchaîné pour son absence de communication sur le problème des soudures sur les tuyauteries d’évacuation de la vapeur de l’EPR de Flamanville, l’ASN a mis en ligne une note d’information technique
Le 22 février dernier, EDF avait annoncé avoir détecté que des soudures du circuit secondaire de l’EPR qui évacue la vapeur des générateurs de vapeur vers la turbine n’avaient pas la qualité requise. La compagnie n’avait pas informé les sous-traitants des exigences dite de « haute qualité » dans la réalisation de ces circuits. La compagnie avait pourtant prescrit “un renforcement des exigences de conception, de fabrication et de suivi en service” afin d’exclure la rupture et éviter de la prendre en compte dans sa démonstration de sûreté. L’exigence dite de « haute qualité » n’est donc pas garantie.
Dans son édition du 28 février 2018, le Canard Enchaîné critique l’ASN d’avoir mis plus d’un an à s’alarmer officiellement sur ce problème, malgré sa mission d’information du public de l’état de la sûreté nucléaire. Une mission d’inspection a été effectuée le 21 février 2017 et la lettre de suite, datée du 10 mars 2017 mentionne : “les exigences spécifiques liées à l’exclusion de rupture ne sont pas connues sur le site et leur respect ne fait pas l’objet d’un contrôle et d’une surveillance. Par ailleurs, les entreprises en charge du soudage des circuits semblent rencontrer des difficultés notables dans la réalisation des témoins de soudage. Néanmoins, les activités de soudage inspectées étaient documentées de manière adéquate et réalisées avec rigueur.”
Le 1er mars 2018, l’ASN a mis en ligne une note technique , dans laquelle elle explique qu’“EDF a informé l’ASN début 2017 que ces exigences renforcées n’avaient pas été retranscrites au sous-traitant chargé de la réalisation des soudures préfabriquées en usine en 2012 et 2013. Les contrôles menés sur des « coupons témoins » ont montré que ces exigences renforcées n’étaient pas toutes respectées pour ces soudures.” Le problème remonte donc à 2012 ! Lors de l’inspection du 21 février 2017 mentionnée ci-dessus, l’ASN a découvert que des soudures effectuées sur le site de l’EPR n’étaient pas conformes non plus. Il apparaît qu’“EDF a alors analysé cet écart et détecté que plusieurs de ces soudures ne respectaient pas ces exigences renforcées. EDF en a informé l’ASN en août 2017 puis a présenté un premier bilan de ses investigations en octobre 2017. EDF a transmis à l’ASN en décembre 2017 une synthèse de sa démarche de traitement des écarts détectées en usine et sur site.
L’ensemble de ces écarts remettent en question l’atteinte de la haute qualité attendue dans le cadre de la démarche dite d’exclusion de rupture.” Bien évidemment, aucun de ces documents EDF n’est public.
Enfin, “l’ASN a en particulier demandé à EDF d’étudier les conséquences d’un renoncement à la démarche d’exclusion de rupture sur la démonstration de sûreté du réacteur, la possibilité de réparer les soudures ou de remplacer les tuyauteries concernées et les mesures de suivi en service qui pourraient être mises en place.
L’ASN prévoit de recueillir l’avis du groupe permanent d’experts pour les équipements sous pression nucléaires (GP ESPN) sur ce sujet au second semestre 2018.” A suivre donc…
- Lettre de suite de l’ASN de l’inspection du 21 février 2017
- Note technique de l’ASN datée du 27 février 2018
12 mars 2018 : L’ASN annonce avoir levé la suspension du certificat d’épreuve d’un générateur de vapeur du réacteur n°2 de Fessenheim
Le 13 juin 2016, EDF met à l’arrêt le réacteur n°2 de la centrale de Fessenheim à l’arrêt suite à la découverte d’une irrégularité affectant un fond de générateur de vapeur qui nécessitait des investigations supplémentaires. Et, le 18 juillet 2016, l’ASN suspend le certificat d’épreuve de ce générateur de vapeur car “le processus de forgeage de la virole basse de ce générateur de vapeur, réalisé en 2008, n’a pas été mené conformément au dossier technique remis à l’ASN et aux règles de l’art. L’ASN n’avait pas été informée de cette non-conformité. La connaissance de cette non-conformité, sans justification particulière, aurait conduit l’ASN à ne pas délivrer de certificat d’épreuve en 2012.”
Rappelons que les générateurs de vapeur sont des équipements particulièrement importants pour la sûreté car ils participent au refroidissement du cœur du réacteur et au confinement des substances radioactives. En 2008, au cours du forgeage de la virole basse en question, Creusot Forge a décidé de ne pas couper une des deux extrémités du lingot, appelée « masselotte », car la longueur était trop courte, mais poursuit la fabrication. La majeure partie de celle-ci est donc présente dans la pièce finale, ce qui peut conduire à la présence d’inclusions dans l’acier et à une composition chimique locale du matériau pouvant dégrader sa soudabilité, son vieillissement et ses propriétés mécaniques.
Creusot-Loire, devenu Framatome, explique dans un communiqué que deux viroles aux caractéristiques identiques (nuance d’acier, poids du lingot, dimensions de la pièce) ont été coulées et forgées et que des analyses chimiques et des essais mécaniques (traction et résilience) ont été réalisés sur ces pièces. Framatome conclut que “conclu que l’écart constaté n’était pas préjudiciable à l’intégrité du composant en exploitation”. On n’en sait pas plus. Aucun document technique n’est rendu public et il n’y a aucune information supplémentaire dans le communiqué d’EDF.
Pour en savoir plus, il faut aller lire l’avis de l’IRSN, ou le rapport d’instruction établi par l’ASN, beaucoup plus complet. Il ressort qu’une partie de la masselotte se trouve effectivement dans la virole basse du générateur de vapeur… Le groupe permanent d’experts pour les équipement sous pression nucléaires a, dans son avis, validé la position de l’ASN. Il convient de noter, cependant, que “Messieurs Jean-Claude AUTRET et Yves MARIGNAC ont assisté aux échanges et, considérant que l’anomalie relevait d’un contexte de fraude, n’ont pas souhaité prendre part à la rédaction de l’avis.”
En effet, l’IRSN et l’ASN donnent une réponse uniquement technique au problème de l’irrégularité affectant le réacteur de Fessenheim, mais ne donnent aucune information sur le traitement de la fraude très grave à l’origine du problème.
- Communiqué de Framatome (lien direct).
- Communiqué d’EDF (lien direct).
- Avis de l’IRSN (lien direct, copie)
- Note d’information de l’ASN (lien direct).
- Rapport d’instruction de l’ASN (lien direct, copie) et son addendum (lien direct, copie).
- Avis du Groupe permanent d’experts pour les équipements sous pression nucléaires (GP ESPN) (lien direct, copie).
- Décision du président de l’ASN (lien direct, copie).
6 juin 2018 : l’ASN présente les premières mesures mises en place pour faire face au risque de fraude
Rappelons que des irrégularités pouvant s’apparenter à des falsifications avaient été détectées début 2016 dans la fabrication de composants nucléaires à l’usine Creusot Forge. Afin de mieux prévenir et détecter ce type d’irrégularités, l’ASN a mis en place quelques mesures. En particulier, dispositif permettant à un lanceur d’alerte de transmettre un signalement concernant une fraude ou falsification potentielle est en cours d’élaboration. L’ASN a également prévu de recruter deux agents spécialistes de la lutte anti-fraude et de compléter la formation de ses inspecteurs dans ce domaine.
Rien ne dit si ces mesures auraient permis de détecter les fraudes au Creusot.
Voir la note d’information de l’ASN (lien direct).
18 juillet 2018 : Greenpeace et le Réseau Sortir du Nucléaire portent plainte à propos des des soudures défectueuses sur des tuyauteries du circuit secondaire de l’EPR de Flamanville
Le Réseau Sortir du nucléaire et Greenpeace France annoncent déposer plainte contre EDF, Framatome et contre X pour 10 infractions devant le procureur de la République de Cherbourg. Selon les associations, le fait d’installer et utiliser des équipements sous pression nucléaire ne satisfaisant pas aux exigences essentielles de sûreté constitue un délit. De plus, EDF a également commis un délit en n’informant l’ASN qu’en 2017 de défauts qu’elle avait pu constater dès 2015 en usine.
Voir le communiqué de presse (lien direct) et le texte de la plainte (lien direct).
25 juillet 2018 : l’ASN définit les conditions de reprises de certaines soudures défectueuses
EDF s’était engagée à faire réaliser des soudures qui ne pouvait pas lâcher (en exclusion de rupture) afin de ne pas avoir à prendre en compte leur rupture dans la démonstration de sûreté. Faute d’en avoir infirmé les sous-traitants, certaines soudures du circuit secondaire, réalisées en usine ou sur site, ne satisfaisaient pas à ces exigences. La compagnie a proposé à l’ASN (proposition non publique) de reprendre une partie de ces soudures et d’en laisser d’autres en l’état.
L’avis de l’ASN envoyé à EDF est public (lien direct). En ce qui concerne les soudures laissées en l’état, l’ASN stipule : “Cette démarche soulève de nombreuses questions. Elle nécessitera en tout état de cause des essais et des justifications complémentaires de votre part.” Pour ce qui est des soudures reprises, une partie du métal déposé initialement va rester. Il doit être contrôlé avant toute opération. Enfin, EDF doit surveiller les opérations de ses sous-traitants.
Voir la note de l’ASN (lien direct) et le courrier envoyé à EDF (lien direct, copie).
Dans un communiqué publié le même jour (lien direct) EDF explique, avoir contrôlé 148 des 150 soudures du circuit secondaire principal de l’EPR de Flamanville. 33 soudures présentent des écarts de qualité et vont faire l’objet d’une réparation. 20 autres soudures vont être refaites car elles ne respectent pas le principe d’exclusion de rupture. Enfin, pour 10 autres soudures, EDF a proposé à l’ASN une démarche de justification spécifique permettant de confirmer le haut niveau de sûreté de l’installation tout au long de son exploitation. On arrive donc à un total de 63 soudures présentant des écarts. Les 85 autres soudures seraient conformes.
En conséquence, EDF reporte d’un an le démarrage de l’EPR de Flamanville, à la fin 2019, voire début 2020, et révise le coût de construction qui est porté de 10,5 à 10,9 milliards d’euros (en euros 2015, hors intérêts intercalaires). Le chantier, commencé en 2007, devait coûter 3 milliards d’euros et la centrale démarrer en 2012…